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Le petit complet gris.

Le petit complet gris.

Harry était un gars bien,
enfin, en apparence.
Il fréquentait surement quelques uns des endroits à la mode, mais du coin de l’œil.
Il ne rentrait jamais trop tard chez lui, comme il ne se levait jamais trop tôt.
Ah oui !
Harry était du genre solitaire aussi, il aimait se reposer parfois, sur le coin  de son lit, la tête dirigée vers sa bibliothèque.
Simplement accoutré, il aimait se promener de tôt matin, le dimanche, entouré des odeurs qui lui étaient à présent, d’un commun accord, familières.
Il se réjouissait aussi des parfums de l’humus, de la putréfaction des feuilles mélangée à la sève des arbres toute chaude.
Il portait des derby’s qu’il avait acheté à Londres un jour pluvieux près de Hyde park.
Il portait un complet gris, qu’il avait fait tailler à bas pris lors d’un voyage à Istanbul, près de la mosquée bleue.
Il l’avait d’ailleurs estampillée d’une tache d’houmous qu’il avait englouti quelques heures après et qui trônait fièrement sur lui, comme un logo ou autre slogan qui semblaient vouloir lui rappeler d’ou il venait.
Au fond, il se disait que ca valait mieux qu’un stupide tee-shirt “I love New York”  acheté à China Town pour 10 dollars.
Sa valise, il l’avait récupérée en RDC lors d’un changement de régime, il s’en était saisi sur le pouce, embarquant avec lui toutes ces parcelles de vies consommables qu’il avait amassées lors de son bref périple d’expatrié dans l’union minière.
Harry fumait des havanes qu’une amie hôtesse lui ramenait “en duty free” et quelle promenait sous le manteau après un court périple à dos de locaux;
Prise entre l’odeur âpre du conducteur et celle d’une vielle moto américaine qui semblait ne pas vouloir s’arrêter de cracher…
Elle lui racontait l’œil brillant son sentiment de liberté alors, cette peur qu’elle ressentait.
Harry se contentait de hocher la tête, feignait quelque sourires tout en comptant discrètement la somme de 80 dollars qu’il venait tout juste de négocier avec elle.

“Immortel”, ce mot résonnait en lui depuis la plus tendre enfance, car de père et de mère Harry en était dépourvu, il n’en faisait pas rigueur, c’était sa vie, c’était comme ça.
Simplement il s’était construit autour de ca, et c’était très bien.
Les choses devaient avoir leur place et pas forcément d’origine, du moins c’est ce qui articulait sa vie.

“No more questions”

Quand il était contrarié, quand ca allait trop loin, quand tout lui volait au visage, c’est ce qu’il répondait.
Avec le flegme et le pragmatisme qui le caractérisaient si bien.
Pas un mot au dessus de l’autre, c’est ce qu’il avait appris, c’est ce qu’il faisait de mieux, c’est ce qui l’avait construit, l’avait fait s’élever parmi les siens.

Un jour Harry nous a dit au revoir.
Simplement comme il était venu.
Le tout consigné dans une petite boîte.
Quelques photos, un vieux passeport, et un petit complet gris.

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